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Yasmina Reza
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Récits de certains faits
Yasmina Reza
- Flammarion
- Littérature française
- 4 Septembre 2024
- 9782080463913
Un jour Édith rencontre un homme, il est pompier, isolé aussi. Ils nouent une sorte de flirt. Ils se voient dehors, en cachette, sur des aires diverses, ils discutent. Pas grand-chose de vraiment intime. À la cour qui lui demande ce qu'il représentait pour elle, l'homme répond avec un fort accent toulousain : "J'étais sa bulle d'oxygène.
- Cette expression c'est la sienne ou elle l'exprimait autrement ?
- Ben... c'est vrai que j'étais sa bulle d'oxygène.
- Et de quoi parliez-vous ?
- De tout et de rien.
- Mais encore ?
- Heu... On parlait de tout et de rien.
- De tout et de rien.
- Oui, c'est ça... De tout et de rien."
Dans les tribunaux, les gens disent souvent qu'ils ont parlé "de tout et de rien". Ils se voient dans des endroits qui sont nulle part, ils se disent des choses dont la substance s'étiole aussitôt. Pas de reproches, pas de chagrins. C'est l'arrière de la vie. -
« Mon ami Serge a acheté un tableau. C'est une toile d'environ un mètre soixante sur un mètre vingt, peinte en blanc. Le fond est blanc et si on cligne des yeux, on peut apercevoir de fins liserés blancs transversaux. Mon ami Serge est un ami depuis longtemps. »
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« Chez ma mère, sur sa table de chevet, il y avait une photo de nous trois rigolant enchevêtrés l'un sur l'autre dans une brouette. C'est comme si on nous avait poussés dedans à une vitesse vertigineuse et qu'on nous avait versés dans le temps. »
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« On a voulu être sympathiques, on a acheté des tulipes, ma femme m'a déguisé en type de gauche, mais la vérité est que je n'ai aucun self-control, je suis un caractériel pur »La pièce Le Dieu du carnage a été créée le 25 janvier 2008 au théâtre Antoine avec Isabelle Huppert, dans une mise en scène de l'auteur.« Une manière très moderne et très séduisante d'incarner comme aucune voix en France actuellement, les meilleures traditions de la littérature française. »Tilman Krause, Die Welt.« Brillantissime. On en ressort avec une tension élevée, en ayant ri aux larmes. »Christine Dssel, Süddeutsche Zeitung.« On peut prédire à cette pièce un destin triomphal. »Matthias Heine, Die Welt.« En trois mots : une pièce géniale. »Gerhard Stadelmaier, Frankfurter Allgemeine Zeitung.« Yasmina Reza s'élève au-dessus des genres. Comme Tchékhov, Wilde ou Schnitzler, elle campe sur le grand champ de bataille de la comédie. »Tagespiegel.« La quintessence de l'esprit de finesse. »Luc Ferry, LCI.« Elle en dit plus sur notre société que tous les graves essayistes de notre temps. Notre meilleur auteur de comédie contemporain. »Étienne de Montety, Le Figaro.« Extraordinaire dialoguiste, elle renoue ici avec la verve qui avait enthousiasmé les lecteurs d'Art. »Frank Nouchi, Le Monde.« Yasmina Reza sait saisir les secondes éternelles. »Marie-Laure Delorme, JDD.« À partir de situations somme toute banales de notre univers quotidien, elle parvient à monter des mayonnaises effrayantes, à transformer des gens civilisés en minables barbares, grâce à l'arme fatale des mots. »Marie Chaudey, La Vie.« Un huis-clos qui se lit comme un roman... Reza sait fort bien mettre le doigt là ou ça fait mal, mais aussi nous faire rire. »Femme Actuelle.« Envie d'une lecture courte, forte et acide, qui se dévore d'une traite ? Vous serez comblé par ce petit livre jouissif. »Psychologies.« Une explosive danse de mort au burlesque leitmotiv Une lucidité ravageuse qui lie petite et grande histoire, philosophie et divertissement, Ionesco et Sarraute. Un électrique plaisir de lecture. »Fabienne Pascaud, Télérama.« Drôle et perfide. »Odile Quirot, Le Nouvel Observateur.« Très cruel et très drôle. »Jérôme Serri, L'Express.« Un acte de plus, et de plus en plus sec, dans son imparable drôlerie, à la grande comédie que Reza construit sur notre impuissance à aimer. »Gilles Costaz, Les Échos
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"Tout le monde riait. Les Manoscrivi riaient. C'est l'image d'eux qui est restée. Jean-Lino, en chemise parme, avec ses nouvelles lunettes jaunes semi-rondes, debout derrière le canapé, empourpré par le champagne ou par l'excitation d'être en société, toutes dents exposées. Lydie, assise en dessous, jupe déployée de part et d'autre, visage penché vers la gauche et riant aux éclats. Riant sans doute du dernier rire de sa vie. Un rire que je scrute à l'infini. Un rire sans malice, sans coquetterie, que j'entends encore résonner avec son fond bêta, un rire que rien ne menace, qui ne devine rien, ne sait rien. Nous ne sommes pas prévenus de l'irrémédiable."
Prix Renaudot -
James Brown mettait des bigoudis
Yasmina Reza
- Flammarion
- Littérature française
- 30 Août 2023
- 9782080436153
PASCALINE À partir de cette soirée, nous n'avons plus vécu avec Jacob.
LIONEL Non.
PASCALINE Nous avons vécu avec Céline Dion.
LIONEL Nous avons vécu avec la chanteuse Céline Dion dans le corps de notre fils Jacob Hutner.
PASCALINE Oui. -
Dans le 95, qui va de la place Clichy à la porte de Vanves, je me suis souvenue de ce qui m'avait enchaînée à Igor Lorrain. Non pas l'amour, ou n'importe lequel des noms qu'on donne au sentiment, mais la sauvagerie. Il s'est penché et il a dit, tu me reconnais ? J'ai dit, oui et non. Il a souri. Je me suis souvenue aussi qu'autrefois je n'arrivais jamais à lui répondre avec netteté. - Tu t'appelles toujours Hélène Barnèche ? - Oui. - Tu es toujours mariée avec Raoul Barnèche ? - Oui. J'aurais voulu faire une phrase plus longue, mais je n'étais pas capable de le tutoyer. Il avait des cheveux longs poivre et sel, mis en arrière d'une curieuse façon, et un cou empâté. Dans ses yeux, je retrouvais la graine de folie sombre qui m'avait aspirée. Je me suis passée en revue mentalement. Ma coiffure, ma robe et mon gilet, mes mains. Il s'est penché encore pour dire, tu es heureuse ? J'ai dit, oui, et j'ai pensé, quel culot. Il a hoché la tête et pris un petit air attendri, tu es heureuse, bravo.
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Elle s'enduisait de la vieille crème de huit heures d'Elizabeth Arden. Tu pues le camphre Gigi, je disais. Elle répondait c'est un aphrodisiaque, la pauvre
Au temps du Théâtre de Clichy, j'étais sa seule amie. Les autres étaient jalouses
Les hommes tournicotaient comme des mouches. Elle tombait amoureuse plusieurs fois par mois.
À vingt-trois ans elle s'est trouvée enceinte. Pendant deux jours on s'est cassé la tête pour savoir quoi faire et puis elle a dit, allez hop je le garde. Ça ne l'intéressait pas de connaître le père : de toute façon il me fera chier -
« Où est l'enfance ? Des jours écoulés et vécus, il devrait de temps en temps jaillir une image lumineuse, une fulgurante réminiscence.
Mais rien ne surgit. Rien ne triomphe du désir d'oubli. » -
« Tu me bravais avec cette ridicule soif d'absolu qu'ont les gens de cet âge et je me disais, le petit est véhément à souhait, il sortira du lot. Mais tu n'es sorti de rien. Les vapeurs de jeunesse passées, tu as repris ta place dans la moyenne. Plus trace d'insurrection. Plus trace de vengeance. Tu as si vite craint pour ta peau, mon pauvre enfant. Comme la cohorte de tes amis les veules, tu sais que tout geste se paye, aussi as-tu choisi d'emblée de ne plus te signaler. Ecarter la souffrance, tel est votre horizon. Écarter la souffrance, vous tient lieu d'épopée. »
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J'ai fait le rve suivant. Mon pre mort revenait me voir.
- Alors, lui dis-je, comment est-ce ? As-tu rencontr Beethoven ?
Il se renfrogne et secoue la tte avec dgot et tristesse :
- Ah, la, la ! Horrible rencontre !
- Comment a ?
- Trs antipathique. Trs.
- Mais comment, papa ?
- Je m'approche de lui, poursuit mon pre, prt le serrer, sais-tu ce qu'il me dit :
Comment avez-vous os vous attaquer l'Adagio d'Hammerklavier ! Comment avez-vous pu une seule seconde vous imaginer interprter une mesure d'Hammerklavier ?
- Pardonnez-moi matre, lui rpondit mon pre, je vous imaginais au-dessus de a prsent...
- Mais enfin ! s'crie Beethoven, tre mort n'est pas tre sage !
Ce rcit a reu le Prix de la Nouvelle de l'Acadmie Franaise en 1997. -
« Le maître de mon mari a étranglé sa femme, lui se contente de laisser sa main choir au bout de l'accoudoir, de façon lamentable et flétrie. Mon mari n'a pas de radicalité. C'est un disciple. La génération de mon mari a été écrasée par les maîtres. »
Dans la luge d'Arthur Schopenhauer a été adapté au théâtre par Yasmina Reza.
La pièce se donne au Théâtre Ouvert, Paris 18e, jusqu'au 21 octobre 2006.
Mise en scène : Frédéric Bélier-Garcia, avec André Marcon, Maurice Bénichou, Christèle Tual et Yasmina Reza.
« Adapté d'un de ses vifs et musicaux petits romans polyphoniques, l'exercice est virtuose. Yasmina Reza - entre Schnitzler et Nietzche, pourquoi pas ? - devient grand auteur. Très grand auteur.
Fabienne Pascaud, Télérama -
L'aube le soir ou la nuit
Yasmina Reza
- Flammarion
- LITTERATURE FRANCAISE (JJ)
- 13 Avril 2010
- 9782081234239
Ils jouent gros. C'est ce qui me touche. Ils jouent gros. Ils sont à la fois le joueur et la mise. Ils ont mis eux-mêmes sur le tapis. Ils ne jouent pas leur existence, mais, plus grave, l'idée qu'ils s'en sont faite.
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Un jour, l'crivain Adam Haberberg s'assoit devant les autruches sur un banc du Jardin des Plantes et pense, a y est j'ai trouv la position de l'hospice. Une position spontane pense-t-il, qui ne peut se trouver que sans effort. Un beau jour, on s'assoit et a y est, on est dans la position de l'hospice. Il se trouve bien dans cette position, je my trouve bien parce que je suis jeune, pense-t-il, et que je n'ai pas l'obligation de my tenir. En temps normal, Adam Haberberg reprend le dessus, mais il n'est pas en temps normal, un homme qui paye 6 euros pour faire quelques mtres le long du quai Saint-Bernard et revenir s'chouer sur le premier banc en face des autruches, dans ce qui est sans doute l'endroit le plus laid et le moins agrable du jardin.
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Un soir, dans un appartement parisien, Henri et Sonia dbattent : faut-il rpondre aux appels de leur fils qui, de son lit, rclame manger alors qu'il s'est lav les dents ?
La situation s'envenime quand apparaissent Hubert et Ins qu'ils croyaient avoir invits pour le lendemain. La situation se dtriore encore, d'autant qu'Hubert - patron d'Henri -, lui apprend qu'une communication sur les halos de matire noire dans les galaxies, sur quoi Henri travaille depuis trois ans, vient dtre publie, ce qui rduit nant ses rves de promotion.
Cette tragi-comdie du quotidien est rejoue trois fois de suite, dans des interprtations diffrentes.
Aprs une cration mondiale de Luc Bondy au Burgtheater Vienne, fin octobre 2000, la pice sera mise en scne en novembre 2000 au thtre Antoine Paris. Elle sera galement l'affiche en dcembre 2000 Londres, en version anglaise. -
La première mondiale de cette pièce a eu lieu le 16 mai 2015 à la Schaubühne de Berlin, dans une mise en scène de Thomas Ostermeier.
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« Les acteurs sont des lâches.Les acteurs n'ont pas de courage.Moi le premier.Les qualités humaines habituelles dans le monde normal sont contraires au bien de l'acteur. »Cinq acteurs répètent une comédie : une réunion de famille au cours de laquelle une mère présente à ses deux filles et à son gendre, le nouvel homme de sa vie, un veuf gérant d'immeuble...
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« Un jour, l'écrivain Adam Haberberg s'assoit devant les autruches sur un banc du Jardin des Plantes et pense, ça y est j'ai trouvé la position de l'hospice. Une position spontanée pense-t-il, qui ne peut se trouver que sans effort. Un beau jour, on s'assoit et ça y est, on est dans la position de l'hospice. Il se trouve bien dans cette position, je m'y trouve bien parce que je suis jeune, pense-t-il, et que je n'ai pas l'obligation de m'y tenir. En temps normal, Adam Haberberg reprend le dessus, mais il n'est pas en temps normal, un homme qui paye 6 euros pour faire quelques mètres le long du quai Saint-Bernard et revenir s'échouer sur le premier banc en face des autruches, dans ce qui est sans doute l'endroit le plus laid et le moins agréable du jardin. »
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A lge de sept ans, j'ai eu un professeur de violoncelle qui s'appelait M. Litnick. M. Litnick tait la bont mme. Il avait un bras qui tremblait. Il ne pouvait plus jouer cause de ce bras qui tremblait. Et il ne pouvait plus enseigner car il n'inspirait plus confiance... Le jour o il est venu pour la dernire fois chez nous, je lui ai dit au revoir et je l'ai regard disparatre de ma vie par la fentre ? M. Litnick traversait la rue. Je pouvais voir de dos qu'il marchait avec chagrin. A l'arrt de l'autobus, il a lev les yeux vers notre appartement, il m'a vu la fentre, et il m'a fait un signe en soulevant son chapeau avec une gentillesse... Dans le sourire de Vienne, il y avait un encouragement identique, quelque chose que je n'avais pas vu depuis des annes, de tendre et d'humain, d'une solitude une autre... Quelque chose de vraiment inattendu de la part d'une femme mon gard.